Quand novembre revient...
Quand novembre revient avec ses jours froids et gris il m’arrive parfois de
me demander s’il y a un sens à tout cela :
Quatre saisons qui nous font voyager de la brise vivifiante de mai aux
bourrasques des froids mortels de l’hiver.
Le temps des ans qui s’accumulent et leur poids sur la charpente et l’esprit
humain; il me semble un peu, toujours, que le toit finira par s’effondrer
sous cette charge perpétuellement croissante.
Les anniversaires qui passent pour les uns, les êtres aimés, pour soi-même, qui sont si nombreux qu’on en vient à ne plus les compter; qu’on finit même par ne plus que les entrevoir.
Ce n’est pas par refus de leur nombre et de ceux qu’il nous reste à vivre
mais juste qu’on s’en est un peu lassés comme on se lasse d’un vieux film
tant de fois visionné, d’une vielle chanson trop fredonnée.
Les souvenirs dont l’album est si volumineux qu’on arrive même plus à le
feuilleter sans se causer un certain ictus au Cœur.
Les vies tombées comme feuilles des arbres qui brandissent leurs bras osseux
vers le ciel l’implorant d’une renaissance; alors il n’est de printemps que
pour les sans-âmes?
Les jours qui œuvrent, les nuits qui soupirent aux rêves éméchés par leur
ivresse invétérée.
Parfois je me demande…
La Foi, l’Esprit, l’intelligence, la connaissance, le cheminement, l’avancée, hier, aujourd’hui,
D
emain...
Parfois,
Oui parfois ?
Pourquoi ?
C’est ainsi que un peu désabusé, courbé par l’énigme cent fois pausée à la
Pensée on se retrouve errant dans un itinéraire d’on ne sait même plus qui
en a tracé le parcours, le départ et l’arrivée.
Puis un lampadaire nous éclaire un peu; « Ah! Ce doit-être moi, oui moi, qui en ai fait le choix. C’est juste que je ne m’en souviens pas ».
Mais peut-être qu’on se goure tous et que ce moi ne nous appartient même pas
et donc nous ne serions que « ses pas ».
Puis la lumière s’éteint parce qu’on quitte son halo pour continuer notre marche aveugle sur ce chemin qui nous est tout aussi étranger d’avant qu’après l’aube d’un questionnement aussi futile qu’est inutile le ver à la pomme si ce n’est pour se nourrir de sa chair et la laisser impropre à consommer.
Alors c’est comme cela qu’on grignote le vivant de la vie et le « conteur » de l’esprit ?
Parfois,
Oui parfois…
Parfois, c’est très facile en automne, une feuille, une seule se détache
d’un bras mort du Penseur pour voltiger devant nos yeux.
Celle-là, oui celle-là seule, vole si longtemps qu’on finit par l’attraper juste au cas où elle ne serait pas totalement flétrie et jaunie d’avoir vécue; pour la conserver ensuite entre les pages de l’album. Peut-être ainsi ne vieillira-t-elle plus et qu’au printemps elle reviendra à la vie.
Parfois,
Ah!
Parfois…
Paul-André Ducharme
photo en illustration - auteur Rejean Boudreau : Forêt d'automne
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de Paul André